Le Muscadet, nouvelle star de la vallée de la Loire

, Le Muscadet, nouvelle star de la vallée de la Loire

Exporté aux quatre coins du monde, le muscadet est produit entre l’océan et Ancenis, sur les bords de Loire, à partir d’un cépage unique, le melon de Bourgogne

Des crus prestigieux

À Château-Thébaud, la famille Lieubeau produit trois des dix crus communaux considérés comme le haut-de-gamme du vignoble nantais. Leur reconnaissance, à partir de 2011, avait entamé la «révolution» du muscadet, selon François Lieubeau. 

En cette matinée de septembre, une trentaine de vendangeurs sont accroupis dans ses vignes, chapeau sur la tête et sécateur en main. Trois porteurs, harnachés de paniers verts, collectent le raisin empilé dans les seaux et le transvasent dans une large benne. La parcelle offre une vue à 180 degrés sur le vignoble nantais, ses vallons verts et ses clochers. Le domaine Lieubeau, fondé en 1816 et converti en bio depuis 2015, produit sur 65 hectares 350.000 bouteilles par an, pour trois quarts du muscadet. «C’est aujourd’hui un vin dans l’air du temps: blanc, sec, léger, fruité. On coche toutes les cases de la demande actuelle», sourit le vigneron, associé avec ses parents, son frère et sa soeur.

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À la conquête de l’Amérique

Marie Luneau, vigneronne du domaine Luneau-Papin, au Landreau, se souvient bien d’une situation inverse, pas si lointaine. «Quand mon mari, fils de vignerons de la région, faisait ses études à Bordeaux, on le regardait un peu de haut comme le «petit gars du muscadet». Il y a encore 15 ans, un vigneron du coin qui travaillait avec des palaces ou de grands clients étrangers, on le regardait avec des yeux ronds», raconte la vigneronne, qui exporte 40% de sa production vers 45 pays. D’après elle, la popularité du muscadet est aussi due à l’accord entre la cuisine actuelle, «plus diététique, légère» et ce vin «digeste», «accessible» et peu alcoolisé. 

François Lieubeau travaille de son côté avec «une centaine de restaurants étoilés», de «belles caves comme celle de la Grande Epicerie», à Paris, et exporte ses muscadets dans «une quarantaine de pays». Importateur américain de vins européens, Jon-David Headrick a vu la popularité du muscadet grimper en flèche dans son pays au fil des dix dernières années. «Les Américains l’ont longtemps vu comme un petit vin de soif, parfois confondu avec le Muscat. Aujourd’hui, il est enfin considéré comme un vin complexe, gastronomique», explique au téléphone ce distributeur, dont les plus gros clients de muscadet sont à New York et en Californie.

Dérèglement climatique

Mais si la demande est florissante, l’offre, elle, se tarit. Le muscadet compte aujourd’hui 400 vignerons, sur 6 500 hectares, moitié moins qu’il y a vingt ans. Le vignoble subit aussi les conséquences directes du dérèglement climatique. «L’hiver est de plus en plus doux et le cépage bourgeonne de plus en plus tôt. Ce qui le rend plus fragile face aux épisodes de gel, qui avaient lieu auparavant tous les 15 ou 20 ans et que l’on subit désormais presque à chaque printemps», observe François Robin, délégué communication de la Fédération des vins de Nantes. 

En avril 2022, le vignoble nantais avait perdu en une nuit de gel la moitié de son potentiel de récolte. «Mes parents avaient connu un seul grand épisode de gel, en 1991. Depuis 12 ans que je suis associé, je suis déjà à mon cinquième», décompte François Lieubeau. Autre menace, le mildiou, maladie de la vigne favorisée par la combinaison chaleur-humidité. Le dos courbé, genoux fléchis, Inès Fadet, vendangeuse de 31 ans, trie attentivement les grains juteux et blancs de ceux, secs et noircis, attaqués par la maladie. Une fois le jus pressé, il fermentera dans des cuves souterraines carrelées de verre, caractéristiques du vignoble nantais. Le muscadet, dit François Lieubeau, «ce n’est pas qu’une mode, c’est tout un savoir-faire». 

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