Suite à l’échec des négociations entre les généralistes et l’Assurance maladie au sujet du tarif des consultations, la fronde s’organise. Depuis ce lundi 12 juin, de nombreux praticiens conventionnés ont augmenté sans autorisation le prix de leur consultation de 5 euros. Explications.
« Nous sommes excédés, au bord du burn-out », se désole Thomas Lacroix, médecin généraliste à Couëron dans le département de la Loire-Atlantique. Il fait partie de ces nombreux généralistes, médecins de famille, à avoir décidé unilatéralement de faire passer le tarif de la consultation de base de 25 à 30 euros depuis ce lundi.
En cause, une accumulation de facteurs qui nuisent selon eux à une médecine de qualité: l’inflation de leurs coûts, un tarif trop bas, bloqué depuis 2017, qui inciterait à faire de la quantité à défaut de qualité, un épuisement généralisé. Et surtout, une proposition de revalorisation de l’Assurance maladie de 1,50 euro par consultation vécue comme une véritable provocation voire « une humiliation » par certains.
Rappelons que lors des récentes négociations avec l’Assurance maladie, les médecins généralistes demandaient que le tarif de la consultation de base passe à 50 euros.
« Cela fait des mois que nous sommes en lutte, pour plus d’attractivité, plus de temps disponible pour nos patients et l’Etat décide l’inverse, nous pousser à faire toujours plus d’actes. Aujourd’hui, la moitié des médecins sont en pré-burnout » explique-t-il à BFM Business.
« On est à bout »
Cette décision est une décision de la dernière chance pour une population de professionnels plutôt légaliste, « il en faut beaucoup pour qu’on transgresse. Maintenant, il ne faut pas nous pousser plus loin, on est à bout. Ce tarif ne reflète tout simplement pas notre engagement au quotidien, on donne tout » souligne-t-il.
C’est en effet un sentiment de ras-le-bol qui prédomine après l’échec des négociations entre les médecins généralistes et l’Assurance maladie. La colère grondait depuis plusieurs mois, elle se transforme désormais en fronde collective faisant tâche d’huile dans plusieurs départements: les Ardennes, la Loire-Atlantique, le Maine-et-Loire ou encore l’Oise.
Réunis en collectifs, en dehors de leurs syndicats, ces praticiens ont pris cette décision radicale et unilatérale avec ces 5 euros de plus pour le patient qui ne seront pas pris en charge par la Sécu.
Et il ne s’agit pas d’actions isolées. Dans les Ardennes par exemple, c’est une soixantaine de généralistes qui sont passés à 30 euros, soit le tiers des praticiens du département selon Libération. En Loire-Atlantique, 200 généralistes rejoignent le mouvement tandis que dans le Maine-et-Loire, ce sont 345 médecins qui sont appelés par le collectif Comeli à passer outre le tarif conventionné.
Combien sont-ils en tout? C’est encore difficile à dire mais selon Thomas Lacroix, 10% de la population de médecins serait concernée.
Pas une nouveauté
Pour les médecins engagés dans cette action, l’objectif premier n’est pas de faire du chiffre d’affaires supplémentaire, mais de faire passer un message.
« Cela pourra être temporaire, chacun fera ce qu’il veut, il n’y a pas de consigne. L’idée c’est de reprendre nos tarifs en main face une Assurance maladie qui ne nous comprend pas, qui est dans une relation contractuelle toxique avec nous » assène Thomas Lacroix.
« On fait du cas par cas, on sait le faire. On pratique déjà des actes gratuits en fonction des situations personnelles. On explique, on communique, les patients nous suivent la plupart du temps, on fait du cas par cas. Depuis lundi, aucun de mes patients a refusé cette augmentation. On ne veut pas pénaliser les gens » plaide-t-il.
Le praticien rappelle néanmoins que ces dépassements sont depuis longtemps monnaie courante dans les grandes villes, notamment à Paris, chez les généralistes de secteur I qui doivent s’en tenir aux 25 euros conventionnés. Ces derniers appliquent en fait un « dépassement pour exigence » autorisé par les textes mais strictement encadré.
Les syndicats dépassés
Cette fronde a été organisée intégralement en dehors des syndicats professionnels qui historiquement ne sont pas vraiment partisans de cette méthode à la hussarde.
Mais face à la mobilisation, les organisations se raccrochent plus ou moins au wagon.
Chez MG France, on rappelle ainsi qu' »augmenter le tarif est possible dans le cadre du ‘dépassement pour exigence’, mais ce n’est pas quelque chose que l’on peut manier librement. Nous ne sommes pas tellement pour ce type de mouvement mais nous comprenons évidemment l’exaspération. Ça devient insupportable, la consultation devrait en effet être aujourd’hui à 30 euros » nous explique Jean-Christophe Nogrette, Secrétaire général.
La Fédération des Médecins de France et l’UFMLS (Union française pour une médecine libre) sont moins prudents. « La FMF soutient les médecins qui considèrent qu’une consultation ne devrait pas être rémunérée à moins de 30 euros » souligne-t-elle.
Le syndicat « invite tous ses militants à organiser localement des réunions pour mettre en place ce vaste mouvement de contestation tarifaire ». Objectif: que « le plus grand nombre de médecins participe à ce mouvement ».
L’Assurance maladie minimise mais menace les frondeurs
Évidemment, ce passage en force n’est pas du goût de la Sécu. Interrogée par BFM Business, la Cnam « entend naturellement les revendications des médecins, dans un contexte d’inflation » et se dit « très attentive à l’évolution de cette situation, notamment sur certains territoires localisés. Il est important de rappeler que le non-respect des tarifs conventionnels pénalise avant tout les patients qui doivent alors payer un reste à charge important ». Et d’en appeler à la « responsabilité des médecins » et « à la négociation conventionnelle ».
Reste que l’Assurance maladie est prête à sanctionner les frondeurs: « ces pratiques tarifaires ne sont pas acceptables et si certains médecins persistent dans cette voie, des sanctions sont prévues, allant de l’avertissement, à la non prise en charge de leurs cotisations sociales par l’Assurance Maladie puis dans les cas les plus extrêmes au déconventionnement ».
« On avisera » répond simplement Thomas Lacroix…
Pour autant, la Sécu minimise un peu ce mouvement en soulignant qu’elle « ne constate pas à ce stade d’évolution notable du recours à ce type de pratiques au niveau national ».
Vers une escalade avec un déconventionnement massif?
Certains praticiens sont pourtant prêts à aller plus loin. L’UFMLS qui soutient cette fronde pousse ainsi au déconventionnement collectif afin de pouvoir librement fixer les prix. C’est un peu l’arme atomique agitée par la profession.
Le médecin qui fait ce choix rompt le contrat qui le lie à la Sécu. Il est alors libre de fixer ses tarifs, n’a plus de comptes à rendre à l’Assurance maladie et passe donc en Secteur III.
Pour le patient, la différence est encore plus importante puisque le remboursement de sa consultation par la Sécurité sociale sera minime: 0,61 euro contre 70% du tarif conventionné. Le reliquat pourra être pris en charge par sa mutuelle en fonction des garanties de son contrat.
Jérôme Marty, médecin généraliste et Secrétaire général de l’UFMLS nous expliquait il y a quelques mois que de nombreux généralistes étaient prêts à faire le grand saut. Pour Thomas Lacroix, c’est une possibilité « légitime » pour reprendre la main sur l’exercice de leur métier.
Une perspective fortement critiquée par l’Assurance maladie et le syndicat MG France pour qui « c’est une mesure stupide ».
Le résultat serait « un abandon des patients les plus pauvres » explique-t-il à BFM Business. Attaquer le conventionnement, c’est attaquer « le pilier de la santé en France et c’est mettre le privé à la place de la solidarité. C’est un vrai danger ».
L’État sous pression
Ces actions visent évidemment à faire plier le gouvernement et donc l’Assurance maladie. Outre la mobilisation, les praticiens misent sur les départs anticipés pour convaincre.
« Il va falloir que le gouvernement se rende à l’évidence quand on voit de plus en plus de médecins qui, épuisés, décident d’anticiper de deux voire trois ans leur départ à la retraite. La raréfaction du nombre de médecins doit déboucher sur une revalorisation, ne serait-ce que pour renforcer l’attractivité de la profession. Le gouvernement risque de se prendre dans le nez son refus » prévient Jean-Christophe Nogrette de MG France.
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